De retour d'un petit trajet à travers la campagne vaudoise. Tout est moite de la pluie de ces dernières heures, et brille sous un pâle soleil. Tout est étrangement calme, rien ne bruisse, mais les amas de feuilles roussies parlent pour les coups de vent d'hier après-midi. Au loin, les Alpes appesanties de neige détrempée nous rappellent qu'on ne voit pas la mer, depuis chez nous…
Je sais plus… je devais probablement faire de l'ordre sur mon bureau, pour passer le temps, mais je sais plus…
Blogger.com était inatteignable, ils étaient en train de faire le ménage eux aussi…
Pause café. Lecture des journaux.
Et qu'est-ce que j'apprends ? Halloween n'a plus la cote ? Cette fête fabriquée, imposée par l'oncle Sam, ne fait plus recette ? Mais vous m'en voyez tout réjoui !
Tiens, ça me fout la pêche, ça. Je me remets au boulot illico.
Hyperconcentré, la tête dans le sac, pour corriger ces épreuves reçues hier. Bon, disons que ma concentration se relâche quelques minutes, le temps d'écrire ce post d'une hallucinante actualité. Mais je m'y replonge…
Heureusement qu'il fait un beau soleil.
Trop mangé, ce soir. Ça doit être l'hiver qui arrive, sournoisement. L'estomac se met à en réclamer un peu plus. Faudrait que je fasse gaffe aux kilos…
Digestion devant la téloche, en regardant Chaos, de Coline Serreau. Où le féminisme rejoint la poésie…
Bon. Grosse confusion ce matin, parce qu'on a simplement oublié le passage à l'heure d'hiver. Et zut ! on gagne une heure et on la galvaude, en ne profitant pas de la passer sous la couette…
Alors, voilà: 10 h. 10, heure d'été: préparation du grand jus dominical traditionnel, carrotes-pommes-raisin-oranges. Le bien-être qui vous coule dans l'œsophage.
Et 10 h. 10, heure d'hiver: tri dans les factures pour payements mensuels…
Ça s'appelle un chaud-froid, en langage courant.
"En vérité, le poète, le vrai poète, possède l'art du funambule. Ecrire, c'est avancer mot à mot sur un fil de beauté, le fil d'un poème, d'une œuvre, d'une histoire couchée sur un papier de soie. Ecrire, c'est avancer pas à pas, page après page, sur le chemin du livre. Le plus difficile, ce n'est pas de s'élever du sol et de tenir en équilibre, aidé du balancier de sa plume, sur le fil du langage. Ce n'est pas non plus d'aller tout droit, en une ligne continue parfois entrecoupée de vertiges aussi furtifs que la chute d'une virgule, ou que l'obstacle d'un point. Non, le plus difficile, pour le poète, c'est de rester continuellement sur ce fil qu'est l'écriture, de vivre chaque heure de sa vie à hauteur du rêve, de ne jamais redescendre, ne serait-ce qu'un instant, de la corde de son imaginaire. En vérité, le plus difficile, c'est de devenir un funambule du verbe."
Neige, Maxence Fermine.
Etant donné qu'on ne peut pas être à la fois au four et au moulin ("comme disait Himmler en quittant Auschwitz pour aller visiter la Hollande"… elle est pas de moi, rassurez-vous, elle est de Pierre Desproges, mais le cynisme de Desproges me fera toujours hurler de rire…), comme on ne peut pas, donc, être à la fois au four et au moulin, j'ai loupé l'opération Biblioblog proposée par Pointblog en septembre dernier. Où les blogueurs (-gueuses) étaient appelé(e)s à donner les trois bouquins incontournables à leurs yeux. (Et accessoirement montrer qu'ils (elles) savent aussi lire ce qui est écrit sur du papier.) Résultats à voir ici.
Pour ce qui me concerne, j'aurais sans doute donné mes suffrages à:
- Belle du Seigneur, d'Albert Cohen
- Si c'est un homme, de Primo Levi
- Rapport aux bêtes, de Noëlle Revaz
Mais bon, c'est trop tard…
Là, on rigole pas, ça bosse. Entretien au LRD (Laboratoire romand de dendrochronologie) pour définir un programme de prélèvements au château d'Aigle en relation avec les analyses archéologiques en cours portant sur la bretèche. Et toc !…
(Tiens, je vais en faire un billet quotidien…)
Dans le train, direction Bâle, nous rendant à l'exposition Paul Klee à la Fondation Beyeler. Je quitte la lecture du mode d'emploi de mon appareil photo numérique (un monument de complexité, l'appareil un peu, mais le mode d'emploi surtout…), et entreprends avec délice celle de Neige, de Maxence Fermine.
«La poésie n'est pas un métier, C'est un passe-temps. Un poème, c'est une eau qui s'écoule. Comme une rivière.
– C'est ce que je veux faire. Je veux apprendre à regarder passer le temps.»
Un soleil bienvenu, aujourd'hui, repoussant au fil de la matinée des traînées de brume pour les envoyer ad patres. La forêt, jaune et rousse, prend de vraies allures automnales. Elle devient vraiment belle, la forêt, quand elle prend un coup de vieux. Un peu comme les mecs…
Dimanche de grisaille, et d'attente… Attente des résultats des élections fédérales, qui ont lieu aujourd'hui. On s'attend en Suisse à un "ras de marée" de la droite pure et dure, populiste en diable, xénophobe souvent et vaguement facho si ça se trouve, pour certains. Laquelle droite s'appelle ici UDC, soit Union démocratique du centre (sic !)… on n'a pas peur des contradictions… Bref. C'est dire si l'avenir européen de notre vieille Helvétie semble de plus en plus lointain.
Tiens… à ce propos… Franz von Däniken, notre secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, aurait dit: "Les europhiles, dans la politique suisse, c'est comme les armes de destruction massive de Saddam Hussein, on a de fortes présomptions de leur existence, mais on ne les trouve pas". (Aurait-on parfois un tantinet le sens de l'humour, sous la Coupole ?)
Un peu groggy hier soir, tard, au sortir d'une représentation de "La bonne âme de Setchouan" de Brecht (mise en scène d'Irina Brook, avec Romane Bohringer).
Une fois de plus, nous sommes des privilégiés. Le Théâtre de Vidy-Lausanne, coproducteur de ce spectacle avec le Théâtre National de Chaillot, Paris, et la Maison de la culture de Nevers, en a la primeur pendant tout le mois d'octobre. Avant son départ en tournée, en France et en Belgique (pour la tournée en Belgique, pas d'info précise, s'cusez-moi…). Quant aux Québécois, désolé, vous vous en passerez… mais qu'est-ce que vous manquez !
Alors, camarades francophones amoureux de Thalie et Melpomène, à vos agendas !
… on essaie, on essaie…
"Avoir éprouvé la fascination des extrêmes, et s'être arrêté quelque part entre le dilettantisme et la dynamite" (E. Cioran, Syllogismes de l'amertume, 1952).
Et merde, un de plus. François Béranger, chantre de la chanson libertaire, vient de casser sa pipe. Il m'avait, lui aussi, aidé à traverser les années 70. On se fait vieux, ma bonne dame, on se fait vieux…
Fragments d'un entretien entendu aujourd'hui même à la radio.
Passer par la haine, c'est prendre le risque de ne jamais en sortir.
La haine on y prend goût. Ça évite de penser.
Avec la haine on est tranquille, on n'a qu'une seule pensée à la fois…
On a le sentiment d'entrer dans une saison sans nom, une sorte de "derrière le miroir", sans ombres, où la lumière semble ne pas avoir d'origine.
"On saisit incomparablement plus de choses en s'ennuyant qu'en travaillant, l'effort étant l'ennemi mortel de la méditation", E. Cioran, Aveux et Anathèmes, 1987.
Elle s'appelle Tania, elle utilise la poésie comme une arme.
Elle collait ses poèmes contre les murs de la ville. Elle voulait donner quelque chose d'elle aux gens qui passent, égayer leur journée: pendant 12 mois, une soixantaine de poèmes par semaine. Faites le compte: près de 3000 textes accrochés aux façades du centre de Lausanne. Avec le temps, ils se détériorent, les mots s'estompent, ça donne un autre poème, inattendu… Bien sûr, la maréchaussée est intervenue: pas méchamment, avec le sourire, mais fermement.
Alors, Tania a changé de stratégie. Elle imprime ses poèmes en tout petits caractères, sur du papier autocollant. Et elle va dans les supermarchés, elle les colle au hasard sur des produits de grande consommation…
Vieillir, c'est prendre peu à peu conscience de sa propre médiocrité. Ou c'est s'obstiner à ne pas vouloir en prendre conscience.
Voilà peut-être ce qui distingue "bien" et "mal" vieillir…