Petit coup de nostalgie: je réalise que ça fait aujourd'hui un an, jour pour jour, que je m'envolais pour la Syrie, début d'un voyage inoubliable (bien que trop court). Je m'étais alors "promis" d'en donner ici des impressions et des images, je ne l'ai pas encore fait… Faudra vraiment que je répare cette lacune.
Ceci étant — et ça n'a strictement rien à voir —, on se consolera avec l'annonce faite hier que le très helvète (dans tous les sens du terme) donc très sage Calida allait racheter le très coquin Aubade ! En d'autres termes, c'est le frou-frou parisien qui rejoint le pyjama en pilou !
Et enfin, un régal des sens en ce bel après-midi pré-estival. D'abord, le plaisir du palais, avec un petit saut dans le vignoble de Lavaux pour une dégustation où, comme trois à quatre fois dans l'année, mon vieux copain Alain remonte de sa Provence d'adoption afin de nous faire apprécier la dernière mouture des vins de son domaine de la Cressonnière. Et donc occasion d'emporter quelques cartons afin de regarnir sa cave… Ensuite, le plaisir des yeux, avec une visite à la galerie Pauli à Lausanne, visite in extremis puisque c'était aujourd'hui le dernier jour d'exposition des oeuvres deFabienne Verdier. Après un séjour de dix ans en Chine pour s'initier à l'art pictural et à la calligraphie auprès d'un maître traditionnel, cette artiste parvient à nous faire pénétrer dans un monde incroyablement serein, fait de silence et d'équilibre. Quelle femme, et quel parcours ! Enfin, un petit coup d'odorat dans une nature en éveil.
Pour ce qui est des autres sens, je m'abstiendrai de tout développement…
Vouloir des mots silences qui plongeraient dans le sol comme des racines. Des mots murmures qui courraient sous l'écorce, jusqu'à éclater comme des bourgeons, dans un soleil revenu. Vouloir des mots labyrinthes pour oser se perdre, et espérer se retrouver. Des mots angélus sous de pesantes voûtes, à la lueur d'un vitrail. Vouloir des mots porcelaine à la saveur d'un thé vert bu au crépuscule, des mots cendres encore chauds du feu qui les consuma. Et vouloir des mots bleus, ou noirs, pour dire l'eau des puits, et les regards de l'élégance.
Il y a des printemps qui débarquent, tonitruants, avec armes et bagages, alors qu'on ne les attend pas encore et que l'hiver a à peine fermé ses cartons… Aussi, pour se faire pardonner et ne pas jeter leur prédécesseur à la rue, ils l'invitent encore à leur table, histoire de s'en faire encore un petit, pour la route. Et c'est comme ça qu'on se retrouve dans la grisaille. Alors si vous voulez voir mon cerisier en fleurs, allez le voir l'année passée…
Il avait moins peur de la mort lorsqu'il se mettait à penser à tous ceux qu'il connaissait et qui avaient déjà fait ce passage. Comme un enfant qui tremble devant un fossé à franchir mais qui, voyant ses camarades sauter et passer de l'autre côté, s'enhardit et se murmure à lui-même: «S'ils l'ont fait, je peux bien le faire.» C'est exactement ce qu'il se disait. Si tous ceux-là étaient morts, qui n'étaient ni plus braves ni plus aguerris que lui, alors il pouvait bien mourir à son tour.
Parmi les sujets dont hérite mon fils cadet pour sa prochaine dissertation française, on trouve: «La maturité, c'est la capacité de faire une chose malgré le fait que vos parents vous l'ont conseillée.» C'est de Benoîte Groult, et ça me plaît !